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Début de roman


On dit que dans un roman, le plus important, c’est le sujet.

Le sujet se doit d’être provocateur sans pour autant déranger.

On dit que c’est bien d’insérer des repères historiques, qu’il faut aller au bout de la précision, comme si celui qui lit, la touche du bout des doigts.

On dit des tas de choses, pour que le roman soit beau.

Chacun aime faire rebondir son grain de sel sur ma peau. Apparemment, le sel irrite la peau, il la rend rouge, tout autant que rêche.

J’écoute ces gens qui se baladent sous mon nez, parce qu’ils sont bienveillants. Ils veulent m’aider. Parce qu’un livre ça ne s’écrit pas tout seul, c’est l’humble avis des gens. Ils entassent des conseils, on pourrait croire que j’en réclame. Les gens aiment ça : instruire.

Moi, j’ai envie d’écrire sur un sujet banal. Un scandale domestique, tout ce qu’il y a de plus rentable dans l’histoire de la littérature.

Ce n’est ni spécifique. Ni sensationnel, c’est complètement normal. Ce que j’écris est un scandale, et vous avez toutes les raisons de mépriser ces derniers mots. Je vous le permets, allez-y. Envoyez-moi au diable. J’irai.

C’est un scandale, parce que vous n’apprendrez rien.

Je n’ai rien à déclarer, rien à vous transmettre. J’en suis tout à fait navrée.

Les dates du règne de Louis XIV ne seront pas abordées. Juste pour le principe, je vous les livre : 1661-1715. J’imagine que vous les aviez bien en tête, c’est un simple rappel.

Pour rien au monde, les mots, ici, ne seraient être moralistes, pourtant, je le ressens, vous attendez quelque chose de moi.

Vous espérez une surprise. Vous crevez d’envie d’être étonné. Vous ne savez même plus pourquoi vous obéissez à la machinerie du réveil.

Vous savez quoi ?

Moi non plus, je ne sais pas. Je ne sais rien. Ce que je sais, c’est que je suis née et qu’un jour, je serai morte. Ce sont des choses qui arrivent. Qui se produisent tous les jours, plusieurs fois par seconde même. Certains rendent des statistiques, tout ça s’enregistre. Les ordinateurs servent à stocker tout ce qui apparaît et disparaît. Tout reste.

Oui, les gens naissent et meurent. Comme des cellules qui se déchiquettent, pour laisser les nouvelles rafraîchir l'épiderme.

C’est ce que l’on appelle biologie, on se contentera de cette explication.

Maintenant, que vos projections sont réduites à néant. Que vos illusions sont du passé, je peux désormais parler. Je m’apprête à décrire l’inutile. Suivez ces mots, je vous emmène.

Fin comme feinte.

Crédit photo : Gallimard, La Papeterie. Redoutables, ces éditeurs.

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