L'échec scolaire n'existe pas
Le différent
Le petit n’écoute pas à l’école. Il a d’autres chats à fouetter. Les numéros l’embrouillent, et les lettres l’angoissent. Pour oublier les mots de la maîtresse, il dessine. Il gomme, il crayonne, il dessine. Il dessine des chats qui se réfugient dans des pots. Les pots, qu’ils tracent, sont en réalité des poubelles.
La maîtresse a convoqué ses parents, Monsieur et Madame Larmoyer. Elle a prononcé des mots, qui ont effleuré les cils de la mère. Pour retenir, le liquide, pour ne pas gâcher toute sa toilette, la mère s’est précipitée aux cabinets. Elle a tiré un morceau de papier toilette, elle l’a chiffonné et a tapoté, tapoté ses paupières, ses cils, la zone des yeux.
La maîtresse a dit que le gosse était en échec scolaire. Le gosse va pas s’en sortir. Il fera pas d’études. Il ne sait même pas jouer de la flûte, le comble pour un garçon.
La maîtresse a dit qu’en CE2, si un gosse dessine des mots plutôt que de les écrire, il finira au bagne, au mieux chez les fous. La mère n'a pas pu retenir le flot, le liquide s’est étalé. Le mari avait honte, il esquivait le regard de sa femme. Il fixait de loin l’ovale de la maîtresse.
Cet entretien le barbouillait. L’échec scolaire, ça provoque des nausées, il a l’impression d’être enceinte. Il courrait bien aux toilettes, pour dégueuler.
La maîtresse n’aime pas les créatifs. Elle a eu un amoureux, il y a longtemps, il l’a quitté. C’était un artiste. Depuis, elle tue les carrières. Elle ne s’en rend pas compte, c’est inconscient.
Elle n’ira pas s’allonger sur un divan, son père a quitté sa mère, il n’a rien laissé, à part le divan. Pendant dix ans, elle a dormi le dos contre le dur du divan, c’était fort inconfortable.
Crédit Photo : Ducobu - le film